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A la découverte de l’artiste digitale Laureline Galliot

Une Designer sensible qui utilise la couleur pour mettre en valeur l'émotion du geste

20 mai 2019

Laureline Gaillot

Crédit : Laureline Galliot

Laureline Galliot est Designer et Artiste digitale. Elle nous a séduites par son approche du monde résolument contemporaine. Elle collecte des objets du réel pour enrichir son laboratoire personnel puis utilise la tablette tactile et l’impression 3D afin de faire grandir les portraits, les objets et les motifs de son « petit monde ».
Après avoir étudié le design de mode à Olivier de Serres et le design produit à l’ENSCI les ateliers, Laureline a été lauréate de la Design Parade 8 à la Villa Noailles en 2013. Elle a depuis une activité très variée : elle a collaboré à plusieurs reprises avec le centre Pompidou, a participé à différentes design weeks, travaille avec la marque Italienne de tapis Nodus et a récemment effectué une résidence de 6 mois à la Villa Kujoyama de Kyoto.

Qu’est ce qui t’a donné envie de poursuivre un parcours artistique ?

Je ne suis pas sûre que ce soit un choix conscient. Je crois que ce sont plutôt des rencontres qui m’ont amenée à ce parcours. Toute petite je prenais du plaisir à dessiner, j’étais dans ma bulle, j’ai le souvenir d’avoir eu très tôt de fortes connivences avec les matériaux. Par exemple, quand on m’a mis de l’argile dans les mains pour la première fois, j’ai ressenti quelque chose de très fort, le sentiment d’être canalisée et dans le temps présent. Et ça je ne l’ai jamais ressenti en faisant autre chose. Je me souviens que je faisais déjà des modelages de visages, comme des mini portraits très réalistes, qui faisaient un peu peur d’ailleurs. Je faisais de la peinture et du modelage en parallèle de mon bac général. Puis j’ai réalisé que ces études classiques ne m’intéressaient pas. En terminale, je suis allée visiter les écoles d’Art et j’ai eu un coup de cœur pour les gens que j’ai rencontrés à Olivier de Serre. Mais je n’ai jamais voulu être artiste, ce sont plutôt les rencontres avec les gens et les matériaux qui m’ont orientée dans cette voie. Je n’ai jamais décidé, je crois plutôt que c’est la vie qui a décidé pour moi !

Laureline Gaillot

Autoportrait de Laureline Galliot

Comment s’organisent ton travail et ta vie de designer ? Comment choisis-tu les projets sur lesquels tu travailles ?

Je collecte en permanence des choses qui m’inspirent, comme dans un laboratoire. Puis je les recroise quand j’ai du temps. Par exemple, je trouve un morceau de bois avec de belles courbes et un jour je l’utilise pour en faire un échantillon. J’hybride les choses ensemble mais au début je ne sais jamais trop vers quoi ça me mène. Il y a également des gens qui me passent des commandes en tant que designer et je me sers alors de toutes ces recherches pour y répondre. J’ai ce laboratoire qui mêle nouvelles technologies, peintures et collectes d’objets. Je travaille très peu d’après photo, j’ai besoin d’avoir les objets devant moi et de ressentir une énergie.
Les gens qui font appel à moi sont par exemple les gens des design weeks en Autriche ou à Milan, qui me demandent de travailler sur des projets spécifiques, un peu exceptionnels, car mon travail est assez marqué, assez identitaire. C’est donc souvent pour faire une communication à 360. Dernièrement, la Maison de moquette Balzan m’a engagée pour démontrer les possibles de l’usine en faisant un travail de recherche de couleurs assez pointu, qui était très intéressant car c’est une maison qui a plutôt une image “old school” alors qu’ils ont un magnifique savoir-faire. Je travaille assez peu sur les produits, je travaille plutôt sur l’image de marque, je suis souvent entre Image & Produit.
Et, même lorsque je n’ai pas de commande, je reste en perpétuelle recherche, je nourris constamment mon laboratoire. Tout ce travail je ne le maîtrise pas vraiment, c’est plus fort que moi. Et toutes mes peintures sur tablette vont par exemple par la suite générer des motifs textiles. Je développe aussi des objets qui sont en train de devenir « ma marque », un petit monde qui grandit avec les expositions car je travaille sur des pièces uniques et différentes en fonction de chaque exposition.

Tu crées en partant de la couleur, elle est fondamentale dans ton travail et dans ta vie. Peux-tu nous en parler ?

Très petite, j’ai commencé à faire de la peinture. Quand je suis arrivée en École d’Arts appliqués, j’ai commencé par le design de mode, la partie liée à la peinture, aux motifs et aux couleurs me plaisait beaucoup. Mais par la suite, en section Design d’objet, il n’y avait plus du tout cet apprentissage de la couleur, notamment parce qu’elle est perçue comme une « finition », « un décor » qui vient à la fin. Ça m’a beaucoup frustrée et j’ai donc cherché à faire différemment. C’est ce qui a donné naissance à ce que je fais aujourd’hui. Je me suis demandé comment je pouvais concevoir des objets directement en couleurs, car dans la réalité la couleur est partout. Quand tu vas dans la nature par exemple et que tu regardes les animaux et les fruits, il y a des couleurs, des algorithmes qui répartissent par exemple les taches sur les chats… Et en peinture, le geste est intimement lié à la couleur qu’on utilise. Je me suis donc juste amusée à ramener ce geste dans l’univers du design et donc à peindre des objets en 3D. La couleur me sert à révéler le geste et l’émotion nécessaires à la conception d’un objet, car je crois qu’on a plus de respect et d’attachement pour un objet quand on sent l’humain qui l’a conçu.

Laureline Gaillot

Crédit : Laureline Galliot

Tu explores aussi plusieurs supports, l’écran, le papier, la céramique, les tapis, les tissus… Comment ces différentes matières s’expriment-elles dans tes créations ?

Au commencement, je fais tout en numérique : je peins et modélise sur IPad, et je fais aussi de la réalité virtuelle. Ensuite, se pose la question de l’incarnation de ces objets dans le réel. Il faut rester très ouvert et laisser la possibilité à chaque matière de pouvoir s’exprimer.
Grâce à l’impression 3D par exemple, mes créations numériques et les objets se créent simultanément. Par contre, dans le textile, c’est plus une question de fibre qui fait raisonner la lumière dans la couleur. J’imprime mes motifs sur plein d’échantillons textiles différents et je vois comment ça vit. Pour le papier, j’aime travailler avec des imprimeurs qui ont l’amour du papier, des spécialistes des impressions d’estampes notamment, avec qui je travaille sur la lumière qui est également différente en fonction de la qualité du papier.
Et en céramique, j’ai par exemple travaillé avec un monsieur qui s’appelle Peter Fink, qui m’a contactée après avoir vu mes pièces au centre Pompidou. Il souhaitait les réinterpréter en céramique car pour lui l’impression 3D est totalement dans l’héritage de la céramique.

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

Des univers très enfantins comme les dessins animés de Miyazaki, Moebius et la BD de science-fiction, des peintres fauvistes, des expressionnistes allemands comme Kirchner… en résumé des artistes qui attaquent direct en couleurs. Je passe ma vie dans les expos, à copier des tableaux à l’IPad pour bien comprendre comment l’œuvre est construite. J’en tire beaucoup de leçons, j’ai l’impression de dialoguer avec le peintre et de comprendre ses petits secrets. J’adore Sonia Delaunay parce qu’elle a brisé les barrières entre Arts plastiques et Arts, et notamment sa période que tout le monde dit « moins intéressante », sa série de portraits avec des couleurs folles. Puis, ensuite, tout bêtement, il y a les fleurs, les légumes et les animaux que je trouve passionnants.

Laureline Gaillot

Crédit : Laureline Galliot

Tu es partie pendant plusieurs mois en résidence à Kyoto. Les Japonais ont un rapport au temps et à la nature très particulier. Qu’est-ce que cela t’a apporté ?

Ce n’est pas pour rien que je suis fan de Miyazaki ! J’ai un rapport animiste aux choses. Pour moi, tout a une âme, voir une chaise cassée me fait presque aussi mal que de voir quelqu’un blessé. Au Japon, la religion Shintoïste exprime le fait que l’homme n’est pas au-dessus de tout, il fait juste parti d’un tout et ça se ressent très profondément là-bas. Philosophiquement, les Japonais ont donc un rapport très respectueux avec la nature. Par exemple, tous les matins très tôt, des petites mamies sortent nettoyer devant leurs portes, ce qui est un comportement très respectueux. Je me suis donc sentie moins bizarre là-bas, mon rapport aux objets était plus commun, car il faut savoir que quand je travaille je parle aux objets et à la matière. Le Japon m’a permis de pouvoir penser que ma fantaisie construit mon rapport au monde.

Quelle est ta couleur préférée ?

C’est le Mauve ! J’ai toujours adoré le violet, depuis que je suis toute petite. Je crois que c’est parce que cette couleur n’est pas si commune dans la vie de tous les jours. Elle est comme réservée au monde onirique des fleurs… C’est une couleur compliquée car personne ne la voie de la même façon, une couleur indomptable qu’on ne peut pas figer. Et, pour les mêmes raisons, j’aime aussi le Mint, une sorte de menthe à l’eau que les gens pensent turquoise et parfois vert.

Laureline Gaillot

Crédit : Laureline Galliot

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