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King Kong Théorie au Théâtre de l’Atelier

FONCEZ AU THÉÂTRE DE L’ATELIER ASSISTER À LA MISE EN SCÈNE DE L’ESSAI FÉMINISTE ET PERCUTANT DE VIRGINIE DESPENTES

9 juin 2018

King-Kong Théorie-Théâtre de l'Atelier

Crédit : King Kong Théorie – Théâtre de l’Atelier

Adaptation de l’essai de Virginie Despentes, la pièce King Kong Théorie, créée en 2014 par Vanessa Larré et Valérie de Dietrich, est reprise au Théâtre de l’Atelier depuis le 25 mai. Nous y sommes allées. Nous avons adoré. Après l’affaire Weinstein, les mouvements #metoo et #balancetonporc, le texte de Virginie Despentes prend une coloration nouvelle. Il résonne encore plus fort. On prend encore plus conscience du caractère percutant et moderne de sa pensée. A travers le récit d’évènements qui ont marqué sa propre histoire, l’auteure pose en effet un regard critique sur la société́ et sur la place des femmes, analysant les mécanismes de la domination masculine. Et les trois actrices – Valérie de Dietrich, Anne Azoulay et Marie Denardaux – nous font passer d’une émotion à l’autre avec justesse et brio.

« Franchement, je suis bien contente pour toutes celles à qui les choses telles qu’elles sont conviennent. C’est dit sans la moindre ironie. Il se trouve simplement que je ne fais pas partie de celles-là. »

Dans la première partie de la pièce, les trois actrices donnent vie aux différentes étapes par lesquelles est passée Virginie Despentes après le viol qu’elle a subi en revenant de Londres en stop avec une copine à l’âge de 17 ans, ce viol qu’elle qualifie dans King Kong Théorie de « fondateur », ce viol qui la « constitue » et la « défigure » à la fois en tant que femme et en tant qu’écrivain. D’abord elle évite d’en parler, elle étouffe l’événement, puis elle prend conscience du caractère ordinaire du viol en ce sens qu’il est incroyablement répandu. Il y a alors un sentiment de révolte et aussi de désaccord avec la façon dont il faudrait se comporter quand on a été victime d’un viol, avec la « série de marques visibles qu’il faut respecter » parce que sinon c’est qu’on n’est pas vraiment traumatisée, c’est qu’on n’a pas dû vraiment s’y opposer à ce viol. Et enfin il y a la découverte de la journaliste américaine Camille Paglia qui valorise la faculté de s’en remettre, une pensée qui aide l’auteure à aller de l’avant.

Il y a un courage qui force le respect dans sa façon d’analyser les discours sur le viol et dans sa liberté de ton. Et il y a sûrement de nombreux cœurs de femmes qui battent très fort dans la salle quand résonnent ces mots à la fin de la première partie de la pièce :

« Il y a ce fantasme du viol. Ce fantasme sexuel. Si je veux vraiment parler de « mon » viol, il faut que je passe par ça. C’est un fantasme que j’ai depuis que je suis petite. Nous ne sommes pas toutes les mêmes, mais je ne suis pas la seule dans mon cas. Ces fantasmes de viol, d’être prise de force, dans des conditions plus ou moins brutales, que je décline tout au long de ma vie masturbatoire, ne me viennent pas « out of the blue ». C’est un dispositif culturel prégnant et précis, qui prédestine la sexualité des femmes à jouir de leur propre impuissance, c’est-à-dire de la supériorité de l’autre, autant qu’à jouir contre leur gré, plutôt que comme des salopes qui aiment le sexe. Dans la morale judéo-chrétienne, mieux vaut être prise de force que prise pour une chienne, on nous l’a assez répété ».

Virginie Despentes-Theâtres parisiens associes

A l’image de ce passage, Virginie Despentes réussit avec ce texte à mettre en lumière ce que l’on préfère souvent taire, masquer, ne pas voir. Elle nous parle de la prostitution, des prostituées et de leurs clients, de la pornographie, des hardeuses et de ceux qui conçoivent ces films par le prisme d’une sexualité masculine. A travers tous ces sujets, elle nous parle à la fois de la société dans laquelle nous vivons, de nous-mêmes, et des réponses qu’elle a trouvées pour s’affirmer, se construire, devenir ce qu’elle est aujourd’hui.

La mise en scène est très illustrative avec des gros plans vidéo filmés live, l’utilisation de divers objets, des jouets d’enfants aux accessoires X… Les trois actrices sont pénétrées par l’énergie qui se dégage du texte, sensibles, inspirées, émues, souvent drôles aussi, comme dans ce moment jubilatoire où elles interrogent le public sur sa perception de la masturbation féminine.

***

Quand j’ai lu Baise-moi, Les jolies choses et Les Chiennes savantes, j’étais au lycée, j’avais 15-16 ans. Je me souviens avoir été profondément marquée par le style, la langue, l’univers de Virginie Despentes. Adulte, trentenaire, femme et mère, je suis toujours marquée par l’intelligence et la portée des messages de celle qui fait désormais partie du jury du Prix Goncourt, qui s’est gentiment embourgeoisée comme elle le dit elle-même, mais a toujours gardé la même liberté de ton.

On ressort de la pièce songeuses, convaincues qu’effectivement il ne serait pas malvenu de ne plus seulement « opposer les petits avantages des femmes aux petits acquis des hommes, mais bien de tout foutre en l’air ». On ressort de la pièce avec de l’énergie à revendre pour se redresser et se reprendre en mains quand on s’est trop laissées aller dans le moule qu’une société masculine a coulé pour nous.

Alors un conseil : foncez au Théâtre de l’Atelier, vous avez jusqu’au 7 juillet !

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Affiche King Kong Théorie

King-Kong Théorie
Théâtre de l’Atelier (du 25 mai au 7 juillet 2018)

 

Texte de Virginie Despentes
Adaptation et mise en scène de Valérie de Dietrich et Vanessa Larré
Avec Anne Azoulay, Marie Denarnaud et Valérie de Dietrich

Réservations : http://www.theatre-atelier.com/king-kong-theorie-lo2407.html

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