29 novembre 2019
Crédit : Les Nénés
En cherchant une marque de lingerie sexy et éthique, nous avons été séduites par le ton et la fraîcheur de la marque Nénés qui a pour slogan “La planète te dit merci et tes boobs aussi”! Sa jeune créatrice, Margot, a réussi à créer il y a seulement 1 an une collection féminine en matières 100% recyclées. Il s’agit de fins de rouleaux de tissus et de plastiques usagés qui sont broyés, nettoyés puis ramenés à l’état de fibres pour être ensuite tissées et devenir de la dentelle ou du tulle (90% d’eau économisée et 80% de production de CO2 en moins par rapport aux matières non-recyclées). Margot a aussi choisi de faire fabriquer en Europe et de vendre ses produits en B to C. En plus de son engagement écologique bien défini, c’est son univers coquin et méditerranéen qui nous a donné envie de la rencontrer.
Margot nous a chaleureusement accueillies dans l’espace de co-working qu’elle partage dans le 11e arrondissement de Paris avec des jeunes marques et des entrepreneurs tous soucieux de l’environnement.
Tu as lancé la marque Nénés il y a un an. Qu’est-ce qui t’as donné envie de dessiner de la lingerie ?
J’ai étudié la communication et le marketing dans une école de commerce et pendant mon cursus j’ai fait des stages dans des grosses boîtes comme Vuitton. J’ai été très surprise et choquée par le fonctionnement et la gestion de ces maisons : les matières utilisées, le gaspillage, l’impact catastrophique sur l’environnement… Même au service communication pour les campagnes publicitaires, l’argent était vraiment jeté par les fenêtres. Je suis passionnée par la mode mais je ne me voyais pas du tout travailler pour ces grandes industries.
Il y a 2 ans, j’ai fait un mon stage de fin d’étude pour une marque de lunettes qui s’appelle Rezin (@rezinwood). Ce sont des lunettes en bois et en matières naturelles. Ce dernier stage m’a mis un pied dans le monde des startups et la mode éthique. J’ai aussi fait un stage entrepreneurial pour une marque de bijoux qui s’appelle Emma et Chloé pour laquelle j’ai fait du sourcing matière et du sourcing usine. J’ai pu découvrir et apprendre comment créer une marque de A à Z.
En parallèle de tout ça, en tant que cliente de mode, je cherchais une marque de lingerie éthique avec des matières fines comme le tulle et la dentelle mais aussi des coupes tailles hautes et échancrées et je ne trouvais pas ! Je me suis alors dit : pourquoi ne pas lancer cette marque moi-même ?
L’utilisation de matières recyclées et un mode de production en circuit court sont à la base de ton concept. Peux-tu nous dire pourquoi ces choix sont si importants pour toi ?
Personnellement, je crois que le réchauffement climatique est là, c’est une évidence. Nous n’avons plus le choix et nous devons agir maintenant chacun à notre niveau. Et surtout au niveau des industries de consommation. Donc c’était complètement logique pour moi dans la création de mon entreprise d’associer mes valeurs et ma passion de la mode pour essayer à mon échelle de transformer ce secteur textile qui est un des plus polluants au monde. Il y a encore beaucoup de travail… mais j’essaye d’apporter ma pierre à l’édifice.
« Personnellement, je crois que le réchauffement climatique est là, c’est une évidence. Nous n’avons plus le choix et nous devons agir maintenant chacun à notre niveau. »
Penses-tu que ces valeurs sont vraiment déterminantes dans l’achat de la cliente ? Et, toi qui fais aussi le choix de ne proposer que 2 collections par an, penses-tu que les consommatrices sont vraiment prêtes à ralentir leurs habitudes de « fast fashion » ?
Oui, je le pense de plus en plus. Il y a des études qui ont été faites sur les consommateurs et il y en a notamment une qui montre qu’en 2019 il y a un quart des Françaises qui souhaitent arrêter la fast fashion. Mais, par contre, je ne pense pas qu’elles soient prêtes à sacrifier “leur style”, je ne pense pas qu’elles vont acheter un vêtement juste parce qu’il est recyclé ou éthique. Je crois qu’elles achètent soit par coup de cœur, soit parce qu’elles se sentent jolies dans le produit. A la base de mon projet, il y a la fibre recyclée mais aussi la volonté de mettre en valeur le corps féminin. Les points forts de ma marque sont les jolies coupes, un côté rétro et des couleurs chaudes . Je ne cherche pas que des clientes 100% écolo, je m’adresse à toutes les femmes.
Tu utilises des tissus avec des certifications reconnues telles que GRS, Oeko-Tex… Ce sont souvent des tissus plus chers et plus difficiles à sourcer. Comment réussis-tu à trouver le bon compromis entre ta marge produit et le prix juste ?
Ça, c’est très difficile justement… j’ai donc choisi de ne pas avoir des grosses marges. Les matières recyclées sont un coût que j’ai anticipé dès la création de ma marque. Finalement, pour moi, le plus cher ce ne sont pas les tissus mais plutôt la confection car je fais fabriquer mes ensembles en Europe. C’est important de travailler avec des ateliers qui respectent et payent correctement leurs salariés. Le problème c’est surtout que j’ai des petites quantités et que je paye donc plus cher la confection. Par contre, si je fais un jour de plus gros volumes, je pourrai peut-être réduire un peu mes coûts de fabrication. J’ai aussi choisi de faire du B to C pour vendre en direct à la cliente pour éviter les marges des revendeurs qui sont souvent énormes. C’est comme ça que je gagne assez pour pouvoir produire d’autres collections. J’évite aussi de faire trop de soldes car je ne peux pas me le permettre avec mes prix.
Mais par exemple, cet été, il me restait des stocks de maillots de bain et j’ai proposé 3 prix avec des appellations comme “nénés sympa”, “nénés cool”… Le prix le plus cher me permettait de couvrir tous les frais de collection, plus les frais de la collection suivante, plus des frais annexes comme le marketing… Le prix du milieu couvrait uniquement le prix de confection et les frais de la collection suivante mais ne couvrait pas les frais de ma société (sachant qu’évidemment, pour le moment, je ne me paye pas). Et ensuite il y avait un prix plus bas qui couvrait uniquement le prix de production.
J’ai expliqué ça pour être transparente, pour éduquer les consommateurs, et aussi pour que les petites bourses puissent s’offrir un de mes produits.
J’ai lu que tu aimerais développer une ligne « grandes tailles ». Peux-tu nous en parler ? Comment conçois-tu le corps féminin ?
Malheureusement, pour ma première collection, j’avais taillé un peu petit et je m’arrêtais donc au 38/40 – ce qui est vraiment petit – mais pour des histoires de coûts de production je ne pouvais pas me permettre de produire dans toutes les tailles. Et, si j’ai choisi de lancer plutôt des petites tailles que des grandes tailles, c’est parce que personnellement je fais une petite taille et que j’ai voulu pouvoir porter ma lingerie dès le début. J’ai fait les essayages sur moi mais, bien sûr, ça me tient à cœur que toutes les filles et toutes les morphologies puissent porter ma lingerie parce que tous les corps doivent être acceptés et vus. J’ai envie de faire des modèles plus adaptés pour les filles jusqu’au 44 ou au 46. Pour le moment c’est trop tôt mais j’espère pouvoir le faire l’an prochain.
Sur mes photos, je ne retouche jamais les corps de mes mannequins. Il faut montrer des filles naturelles. Je choisis par exemple de ne jamais maquiller les filles sur mes shootings.
« Sur mes photos, je ne retouche jamais les corps de mes mannequins. Il faut montrer des filles naturelles. Je choisis par exemple de ne jamais maquiller les filles sur mes shootings. »
Comment élabores-tu tes collections ? Quelles sont tes sources d’inspiration ?
Je suis une fille d’aujourd’hui et j’adore les réseaux sociaux dont je m’inspire beaucoup. Mais j’aime aussi tout ce qui est rétro, des femmes comme Jane Birking, Brigitte Bardot, les coupes super féminines, le Sud, la chaleur de la Méditerranée, les fleurs, les couleurs, les dentelles… En fait je suis très girly de ce côté-là !
Qui sont les femmes que tu admires ?
J’admire les femmes qui m’entourent, mes amies et aussi ma mère. Elle est décédée quand j’étais petite, elle avait beaucoup de classe, elle était très chic, elle avait un style incroyable, c’était aussi une personne ultra punchy, rayonnante avec une immense joie et de vivre.
J’ai aussi un entourage très varié qui m’inspire beaucoup. Toutes mes amies ont des métiers plus beaux les uns que les autres, j’ai des amies institutrices, d’autres médecins…
Sinon j’admire Greta Thunberg car, pour une jeune fille de son âge, je trouve incroyable qu’elle réussisse à défendre ses convictions en allant à l’encontre de certains politiques.
Quelle est ta couleur fétiche ?
J’adore le orange, le Terracota, les couleurs chaudes… Je trouve ça beau été comme hiver, ça va super bien avec la peau et le corps des femmes.
Retrouvez les Nénés sur
Instagram et son site nenes-paris.com
Par Estelle / Elles créent, Rouge Piment